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La guerre dans l'ouest : campagne de 1870-1871

Chapitre 6

Chapitre 7

Chapitre 8

Opérations des Allemands sur la rivière de l'Eure jusqu'à l'évacuation d'Evreux.

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Source : L. Rolin. Image

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boite verte Rencontres de Condé-sur-Vègre (17 octobre) et d'Orgerus (18 octobre)

Sur la rive gauche de la Seine, nous avons laissé les petits corps de Dreux et du camp d'Hécourt en observation devant le général de Rheinhaben, qui se tenait en communication vers Houdan avec la 6e division de cavalerie.
Les patrouilles de ces deux divisions ne cessaient de sillonner le pays.
Le 17 octobre, les hussards du 3e régiment, partis de Rambouillet, allaient en reconnaissance dans la direction de Condé-sur-Vègre, lorsqu'ils essuyèrent dans les bois des coups de feu dont un de leurs officiers fut atteint.
Le lendemain, les éclaireurs de la brigade de Barby, partis de Neauphle-le-Château, coche verte s'avançaient jusqu'à Houdan.
Au retour de cette reconnaissance, ils tombèrent, aux abords d'Orgerus, dans une embuscade où fut blessé un uhlan hanovrien.
Dès que la présence de ces cavaliers avait été signalée à Dreux, la nouvelle y avait causé un certain émoi; dans cette alerte le lieutenant-colonel de Beaurepaire périt malheureusement; en voulant observer les mouvements de l'ennemi, il tomba du haut de la chapelle funéraire des princes d'Orléans, et se tua dans sa chute.

Il nous faut maintenant remonter la rivière de l'Eure, afin de suivre les événements qui s'accomplirent à cette époque sur les confins du département d'Eure-et-Loir, et d'embrasser ainsi l'ensemble de la situation militaire.

A la suite de l'entreprise de la 4e division de cavalerie du prince Albert (père) sur la ligne d'Orléans et de la rencontre de Toury, le grand quartier de Versailles résolut d'écraser le noyau de notre armée de la Loire: il dirigea contre Orléans le général baron de Tann-Rathsamhausen avec le Ie corps bavarois, la 22e division d'infanterie (général-lieutenant de Wittich) et la 2e division de cavalerie (général-lieutenant comte de Stolberg- Wernigerode).

Parti le 8 octobre des environs d'Etampes, le général de Tann s'avança à travers la Beauce sans rencontrer d'autre obstacle que la présence de quelques corps francs, parmi lesquels il faut citer les Partisans du Gers (capitaine d'Asies du Faur), qui lui opposèrent à Angerville la plus énergique résistance. Consulter : 09/10/1870

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boite verte Combat d'Artenay (10 octobre)

Consulter : 10/10/1870

L'issue malheureuse du combat d'Artenay (10 octobre) entraîna le lendemain la perte coche verte d'Orléans .
Après l'occupation de cette ville, le grand quartier général prussien avait d'abord pensé à diriger le général de Tann soit sur Tours , siège du gouvernement de la défense nationale, soit sur Bourges , où s'étaient retirées nos troupes et où se trouvait notre grand établissement d'artillerie; mais le général de Tann , ayant jugé ces entreprises au-dessus de ses forces, reçut l'autorisation de se maintenir à Orléans avec le Ie corps bavarois et la division de Stolberg , en observation contre Bourges.

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boite verte Marche du général de Wittich et du prince Albert (père) sur Chartres et Dreux

Quant aux divisions de Wittich et prince Albert , elles reçurent l'ordre de rejoindre l'armée d'investissement, après avoir fait une forte reconnaissance dans l'Ouest, en passant par Chartres et Dreux.
Leur mouvement commença le 17.

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boite verte Héroïque défense de Châteaudun (18 octobre)

Le 19, elles s'emparent des ruines de la ville de Châteaudun , après avoir rencontré là une héroïque résistance, dont le récit est encore à écrire, bien qu'on en ait publié plusieurs.

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boite verte Occupation de Chartres (20 octobre)

Le 20, elles continuent leur marche sur Chartres , et elles y entrent le lendemain sans coup férir, par suite d'une convention conclue avec les autorités civiles.
Le 23 octobre, le général de Wittich reçut l'ordre de suspendre sa marche sur Paris , de rester en observation à Chartres et d'envoyer de fortes colonnes mobiles dans la direction de Dreux.
En présence des forces considérables qui la menaçaient, cette dernière ville avait été évacuée dans la nuit du 21 au 22 octobre;
mais elle fut réoccupée le 23 par les 1e et 2e compagnies de fusiliers-marins de Cherbourg , le 15e régiment de mobiles du Calvados , les 1e et 2e bataillons du Lot-et-Garonne , le coche verte 3e bataillon de la Manche , une demi-batterie du 7e d'artillerie , un peloton de gendarmes et une compagnie de francs-tireurs, en tout environ 7000 hommes.
Ces troupes furent placées sous les ordres du capitaine de frégate du Temple , qui prit le commandement supérieur avec le rang de général de brigade.

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boite verte Combat d'avant-postes à Chérisy

A peine installé à Dreux, le général du Temple fit occuper Chérisy par trois compagnies du 1e bataillon du Calvados , et, le lendemain, le reste de ce bataillon, sous les ordres du commandant Reynaud , alla s'établir à la ferme de l'Épinay , en avant de la bifurcation des routes de Chartres et de Châteauneuf .
Dans cette position, nos troupes étaient menacées de deux côtés à la fois: sur la droite, c'est-à-dire sur la route de Chartres, par le général de Wittich, et sur la gauche, c'est-à-dire sur la route de Paris , par le général de Rheinbaben, qui tous deux avaient l'ordre de se mettre en communication à Dreux.
Le général de Rheinbaben lança à cet effet, dans cette direction, la brigade de Barby, qui, partie le 23 octobre des environs de Neauphle-le-Château et de Pontchartrain, arriva le même jour à Houdan et poussa ses patrouilles jusque dans les villages de Havelu, Goussainville et Broué, où elles essuyèrent des coups de feu.
Dans la matinée du 24, le général de Barby, dans le but de reconnaître Dreux, s'avança jusqu'à Chérisy , qu'il trouva occupé par une grand'garde du 1e bataillon du Calvados.
Arrivés à peu de distance du poste avancé des mobiles, les dragons oldenbourgeois du 19e régiment mettent pied à terre et commencent la fusillade, tandis que les uhlans du 13e régiment hanovrien se préparent à charger.
Les mobiles parviennent néanmoins à rallier leur réserve.
coche verte Un seul, le garde Binet, fut tué après avoir vendu chèrement sa vie: surpris dans une maison de Chérisy par trois cavaliers, il refuse de se rendre; il couche en joue l'un de ses agresseurs et le met en fuite, mais son fusil rate et il ne lui reste que la baïonnette dont il perce un autre adversaire; saisissant un troisième à la gorge, il est sur le point de l'étrangler, quand surviennent d'autres ennemis qui le transpercent de leurs lances et fendent d'un coup de sabre la tête de ce héros obscur.
Traversant Chérisy, les uhlans se déploient jusqu'à la rivière de l'Eure sous le feu des mobiles postés sur la rive opposée; le capitaine baron de Durant, qui commande l'escadron ennemi, s'étant trop avancé, est démonté ainsi que son trompette.
Après avoir passé la journée à explorer inutilement nos avant-postes, sans pouvoir reconnaître Dreux, le général de Barby se retire dans la soirée sur Houdan.

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boite verte Rencontre de Marville et catastrophe des Cinq-Chênes (24 octobre)

Le même jour, le général de Wittich avait envoyé sur la route de Chartres un premier détachement, composé d'un bataillon, de deux escadrons et d'une section de pionniers, sous les ordres du major de Conring, qui avait occupé Marville poussant ses avant-postes jusqu'à la ferme des Yeux-Bleds.
De ce côté, une section du 1e bataillon des mobiles du Calvados (capitaine Le Hardy) occupait la ferme de l'Epinay; à la tombée de la nuit, elle eut avec l'ennemi une rencontre dans laquelle un fantassin du 95e régiment prussien fut tué et un autre blessé grièvement.
Environ une heure après, une fusillade autrement terrible éclatait, non loin de là, au lieu dit les Cinq-Chênes, coche verte et mettait en émoi la ville de Dreux.
Voici ce qui 's'était passé dans cette direction: le général du Temple, averti de la présence du faible détachement qui occupait Marville, avait conçu le projet de le surprendre par une attaque de nuit; mais dans cette tentative il se produisit une déplorable méprise; arrivés à la hauteur des Cinq-Chênes, les mobiles du 2e bataillon du Calvados se fusillèrent et s'entretuèrent misérablement.
Une douzaine d'hommes périrent, parmi lesquels le capitaine-adjudant-major de Chivré, du 3e bataillon des mobiles de la Manche; une soixantaine furent plus ou moins grièvement blessés.
A la suite de cette catastrophe, le général du Temple se vit dans la nécessité de se replier derrière la rivière de l'Avre dans la nuit du 24 au 25 octobre.

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boite verte Occupation de Dreux (25 octobre)

Le 25, les uhlans se montrèrent vers onze heures du matin sur la route de Chartres, et, quelques heures après, la ville de Dreux fut occupée par une fraction de la cavalerie de la 6e division, sous les ordres du général-major de Schmidt, avec le 95e régiment d'infanterie, un détachement de pionniers et deux batteries d'artillerie. coche verte

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boite verte Reconnaissance des Prussiens sur Anet (26 octobre)

Le 26, malgré un temps pluvieux, le général de Schmidt laissa Dreux sous la garde d'une partie de ses forces, et partit lui-même à la tête d'un détachement de toutes armes dans la direction d'Anet, où il devait se mettre en communication avec la cavalerie de la brigade de Redern qui occupait Mantes.
Mais cette brigade ayant devant elle, à Vernon et à Pacy , des forces respectables, ne pouvait pas découvrir son flanc droit, et elle se contenta d'envoyer ses patrouilles jusqu'à Gilles.
Quant au général de Schmidt, il fouilla la forêt de Dreux et s'avança, jusqu'à Anet, essuyant quelques coups de feu à Marcilly-sur-Eure; puis, après avoir fait reconnaître Ivry-la-Bataille, et envoyé dans la direction de Houdan des patrouilles qui furent reçues à coups de fusil par les francs-tireurs et les gardes nationaux du pays, il revint à Dreux dans la soirée.
Tandis qu'il s'était avancé sur Anet, ses pionniers avaient coupé la voie ferrée à Saint-Remi-sur-Avre, ce qui dénotait de sa part des intentions purement défensives.
Il ne tarda pas, en effet, à se replier sur Chartres, et, en s'éveillant le 28 octobre, les habitants de Dreux furent étonnés de se voir débarrassés de sa présence.
Le motif de cette retraite fut bientôt connu: le général du Temple, qui, à la suite de l'affaire du 24 octobre, s'était retiré sur Saint-André avec son corps de mobiles et de marins, était venu camper le 27 à Louye, au Mesnil et à Saint-Germain, sur la rive gauche de l'Avre.
En outre, une concentration de troupes françaises s'opérait également vers Senonches, et le général de Schmidt avait jugé prudent de se rapprocher de Chartres et de prendre position à Theuvy et aux environs.
Il resta là, en observation sur Châteauneuf et Courville, jusqu'à ce qu'il fût rappelé à Chartres, la division de Wittich ayant reçu l'ordre d'appuyer le général de Tann, auquel nos préparatifs sur la Loire avaient donné l'éveil.
Le général du Temple, de son côté, ayant dû se concentrer sur Verneuil et la forêt de Senonches dans les derniers jours d'octobre, la ville de Dreux, après le départ des Prussiens et l'éloignement des coche verte troupes françaises, se vit abandonnée aux visites alternatives ou simultanées des patrouilles ennemies et des corps francs.

Depuis la fin d'octobre jusqu'à la mi-novembre, il n'y a donc aucun fait important à signaler sur la rive gauche de la Seine; chaque jour, cependant, nos reconnaissances rencontrent celles de l'ennemi, et il en résulte de légers engagements où nos fantassins ont l'avantage: les francs-tireurs dressent, sur toute la ligne de l'Eure et dans les environs de Dreux, des embuscades dans lesquelles les éclaireurs du général de Rheinbaben ou du général de Schmidt viennent donner de confiance et que nous allons énumérer sommairement.

Le 31 octobre, une patrouille des uhlans hanovriens de la brigade de Barby, partie de Houdan sous la conduite du lieutenant de Treskow, s'aventura jusqu'aux environs d'Anet et d'Ivry-la-Bataille; elle fut poursuivie par les francs-tireurs du Puy-de-Dôme (capitaine Bezelgues), auxquels s'étaient joints des gardes nationaux du pays, et elle parvint à grand'peine à s'échapper en laissant entre leurs mains un prisonnier dans cette rencontre, les uhlans eurent en outre 'un homme et plusieurs chevaux tués ou blessés.

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boite verte Rencontre et incendie de Bréval

Le même jour, une douzaine de hussards du 11e régiment, appartenant à la brigade de Redern, qui occupait Mantes et les environs, furent envoyés du Breuil en réquisition à Bréval.
Assis la bride au bras dans les rues du village, ces cavaliers attendaient sans défiance la livraison des fournitures qu'ils avaient réclamées, lorsqu'ils essuyèrent une vive fusillade partie de la grille d'une habitation voisine.
C'était une compagnie du 3e bataillon de la mobile de l'Eure coche verte (lieutenant Villette), qui, en reconnaissance dans ces parages, avait été avertie de la présence des fourrageurs, s'était glissée à travers le bois et avait réussi à les surprendre: dans cette affaire, deux hussards furent tués et deux autres, dont un sous-officier, mis hors de combat et faits prisonniers; il y eut, en outre, plusieurs chevaux tués, blessés ou capturés.
Après ce coup de main, les mobiles regagnèrent leurs cantonnements, et les habitants de Bréval se virent abandonnés sans défense aux représailles de l'ennemi.
Elles ne se firent pas attendre: le soir même, les Prussiens revinrent en force; sous prétexte que l'officier qui commandait les mobiles était vêtu en bourgeois, ce qui n'était vrai que pour leur guide, et que les fusils avaient été chargés avec du plomb de chasse, ce qui était complétement faux, ils mirent le feu à plusieurs maisons, et ils recommencèrent le lendemain leur oeuvre incendiaire, après avoir chassé les habitants de leurs demeures et les avoir fait cerner par un cordon de troupes en dehors du village.
A la même date, le détachement qui couvrait la forêt de Bizy repoussait également les éclaireurs de la brigade de Redern, venus de Mantes.

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boite verte Embuscade a Bonnières (31 octobre)

La 3e compagnie du 1e bataillon de l'Eure (lieutenant Bourrey), embusquée dans les bois qui dominent Bonnières, surprenait une reconnaissance du 10e hussards, lui tuait un cavalier et regagnait son campement du Petit-Val, emmenant trois prisonniers et leurs chevaux.

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boite verte Rencontre de Boissy-Mauvoisin (3 novembre)

Quelques jours plus tard, le colonel Mocquard, ayant repris le campement du bois d'Hécourt, résolut de déloger les Prussiens de Mantes au moyen d'un coche verte coup de main; il forma ses troupes en trois colonnes de 1200 à 1500 hommes chacune, et il se mit en marche, le 3 novembre, avec l'intention de tenter une surprise la nuit suivante; mais, après avoir eu à Boissy-Mauvoisin et à Ménerville de courts engagements, dans lesquels deux hussards prussiens furent tués et un troisième blessé, le général de Redern évacua Mantes à notre approche; il se retira dans la direction de Vert, laissant un détachement avec son artillerie sur les hauteurs de Magnanville et menaçant de bombarder Mantes si les nôtres continuaient leur mouvement.
Dès lors, le colonel Mocquard qui ne possédait pas un canon, se vit forcé de renoncer à son expédition et de regagner ses cantonnements.
A Dreux, les patrouilles du général de Schmidt faisaient de fréquentes apparitions, et les francs-tireurs ne leur ménagaient pas non plus les embuscades, qu'ils dressaient aux portes mêmes de la ville.
Le 31 octobre, sur la route de Nogent , une patrouille des uhlans de Zieten perdit trois hommes dont un prisonnier, et, le 5 novembre, au même endroit, une nouvelle patrouille du même régiment eut un uhlan tué et un autre mortellement blessé.

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boite verte Rencontre de Boncourt (7 novembre)

Le 7 novembre, un petit nombre de uhlans hanovriens, conduits par le premier lieutenant prince Alfred d'Isenbourg, se présentèrent aux portes d'Anet.
Leur exploration terminée, ces cavaliers reprenaient le chemin de Houdan, quand, sur le territoire de Boncourt, ils essuyèrent la fusillade de la 4e compagnie du 2e bataillon de l'Ardèche (capitaine de Miravat).
Deux uhlans blessés, dont un mortellement, restèrent avec leurs chevaux entre les mains des mobiles.
coche verte Le 11 novembre, la garnison de Mantes envoie un fort détachement de réquisition à Bonnières.
Vers 10 heures du matin, 300 Allemands entrent dans la ville et canonnent sans résultat les mobiles qu'ils aperçoivent sur les hauteurs.
Un feu de peloton des francs-tireurs de l'Eure (capitaine Lortie) blesse un fantassin bavarois et met en fuite le reste du détachement.
Le même jour, à Dreux, des francs-tireurs de Laigle et de Mortagne, embusqués dans la gare, y surprennent une douzaine de cuirassiers du 6e régiment prussien, dont trois sont tués, un quatrième blessé et un cinquième fait prisonnier.
La ville de Dreux s'attendait à des représailles pour ce dernier coup de main; mais elle en fut préservée par la présence de forces françaises assez considérables, qui avaient été concentrées aux environs de Verneuil et de Senonches.
La municipalité demanda du secours au général du Temple, qui fut autorisé à occuper la ville.
Parti de Verneuil, il fit sa rentrée à Dreux le 13 novembre à la tête des forces suivantes: le 3e bataillon des fusiliers-marins de Cherbourg, placé sous les ordres du lieutenant de vaisseau Picot; le régiment de la garde mobile du Calvados (commandant de Labarthe); les 2e et 3e bataillons de la Manche, un demi-escadron de chasseurs, un peloton de gendarmes, quelques francs-tireurs, en tout, 6 à 7000 hommes avec une batterie de pièces de 4.
La brigade de Barby, qui, depuis le 23 octobre, n'avait cessé d'occuper Houdan, avait des grand'gardes à Goussainville, Saint-Lubin et Gressey, observant ainsi la vallée de l'Eure et envoyant fréquemment des patrouilles dans la direction de Dreux.

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boite verte Rencontres de Bu, de la Belle-Côte, de Boissy-Mauvoisin et de Gilles (14 novembre)

coche verte Dans la matinée du 14 novembre, quatre uhlans hanovriens, s'étant présentés aux environs de Bu, reçurent une décharge des francs-tireurs de la Gironde (commandant Dutrénit) et des gardes nationaux du pays; deux de ces cavaliers furent tués et un troisième blessé; un seul put s'échapper vers Goussainville d'où la patrouille était partie.
Vers onze heures, les uhlans revinrent en force avec deux pièces d'artillerie, lancèrent quelques obus sur le village et incendièrent une maison.
Mais le général du Temple avait été prévenu à temps: deux compagnies de marins et trois bataillons de mobiles, appuyés par une section d'artillerie, marchèrent sur Bu et débouchèrent vers trois heures de la forêt de Dreux.
Les marins, la baïonnette baissée, s'élancèrent aussitôt dans le village où étaient restés quelques uhlans; mais ces derniers ne les attendirent pas; ils s'enfuirent à toute bride pour rejoindre leur escadron qui était resté en observation, et qui disparut bientôt à son tour, après avoir essuyé une vingtaine de coups de canon.
La vue de nos marins et le bruit de notre artillerie qu'il entendait pour la première fois firent croire au général de Rheinbaben qu'il allait être attaqué sur le champ; il s'empressa d'évacuer Houdan pour se retirer vers Gressey, et il télégraphia le soir même au grand quartier de Versailles qu'il avait rencontré, en position entre Dreux et Bu, des masses de troupes de toutes armes qui paraissaient avancer sur Houdan.
Dans cette même journée, des coups de feu avaient été échangés à Rosny, à la Belle-Côte, à Boissy-Mauvoisin et à Gilles entre les éclaireurs de la brigade de Redern, venus de Mantes, et les francs-tireurs ou les mobiles; coche verte dans ces diverses escarmouches, les hussards des 10e et 11e régiments avaient eu trois ou quatre hommes tués, blessés ou prisonniers.

Les Prussiens s'imaginèrent qu'ils avaient enfin trouvé l'armée de la Loire qu'ils cherchaient depuis Coulmiers; ils supposèrent, en outre, que les troupes du général Fiéreck et celles du général Briand avaient bien pu se réunir à cette armée pour former son aile gauche ou son avant-garde et frapper avec elle un grand coup dans la direction de Versailles.
Les deux hypothèses étaient admissibles, dit un officier supérieur du grand état-major prussien, qui prêtait à nos stratégistes d'alors des conceptions dont ils étaient malheureusement incapables.
Et cependant c'était bien là le point faible et le défaut de la cuirasse allemande.
Les positions occupées par nos corps de la vallée de l'Eure se trouvaient à une distance moyenne de soixante kilomètres de Versailles.
Salbris et Blois, choisis comme points de concentration pour l'armée destinée à débloquer la capitale, en étaient éloignés de sept à huit étapes et, après la reprise d'Orléans, on en était encore à cinq journées de marche.
En laissant notre 15e corps sur la Loire avec la mission d'occuper le grand-duc de Mecklembourg, on pouvait concentrer sur la ligne de l'Eure le 16e corps et les noyaux qui ont servi plus tard à former les autres, les meilleurs éléments de la région de l'Ouest, et l'armée du Nord, qui allait bientôt s'affirmer d'une façon sérieuse; puis, au moyen des chemins de fer d'Amiens, du Havre, de Cherbourg et de Granville, on pouvait jeter sans peine, sur la ligne de Vernon à Pacy-sur-Eure et à Dreux, une armée de combat de plus de cent mille coche verte hommes, facilement ravitaillable, ayant son aile gauche appuyée à la Seine, et n'étant plus menacée en flanc par la marche du prince Frédéric-Chartes .
C'était le moyen le plus simple, le plus expéditif et peut-être le meilleur pour réunir nos forces en un seul faisceau.
En choisissant cette base d'opération, on menaçait directement le grand quartier général et le parc de siége allemands; en deux étapes, ce qui est à considérer avec des troupes jeunes et peu propres aux entreprises de longue haleine on engageait l'action décisive sous les murs de Versailles , du côté même où l'armée de Paris , protégée par la boucle de la Seine et les feux du Mont-Valérien, avait le plus de facilités pour opérer une grande sortie, et où elle l'opéra plus tard dans de tout autres conditions, lorsqu'elle tenta son dernier et suprême effort.
Une marche avec un objectif si rapproché, une bataille livrée dans de telles conditions, à la suite du succès de Coulmiers , dont la nouvelle arrivait alors à Paris et réchauffait tous les courages, auraient donné à l'armée de secours et à l'armée assiégée un élan irrésistible, et auraient forcé les Allemands à lâcher prise devant la capitale.
En admettant, d'ailleurs, que cette tentative eût échoué, rien ne pouvait nous arriver de pire que ce qui nous attendait plus tard.
C'était peut-être, la fortune aidant, l'unique chance qui nous restait.
Les Allemands craignaient cette combinaison, et l'officier supérieur du grand état-major prussien que nous avons cité plus haut, avoue qu'à cette époque une attaque par l'ouest avait les plus grandes chances de réussite: So hatte die feindliche Offensive die grösste Aussicht auf Erfolg, wenn sie von coche verte Western her gegen die Cenirungs-Armee geführt wurde.

A la suite de la rencontre de Bu, le général du Temple avait annoncé au ministre de la guerre qu'il avait le dessein de se jeter à corps perdu dans la forêt de Rambouillet et de tenter de pénétrer jusqu'à Versailles; sa dépêche partit de Dreux le 15 à quatre heures du soir; mais, pour toute réponse, il reçut à minuit l'ordre d'expédier à Vendôme la seule batterie d'artillerie qu'il possédait.
Quoi qu'il en soit, la présence de nos troupes aux environs de Houdan avait vivement éveillé l'attention de l'ennemi qui, depuis quelque temps, se creusait la tête pour deviner les projets que nous aurions pu avoir; aussi, dans la nuit du 14 au 15, l'armée de la Meuse reçut l'ordre d'envoyer sur la rive gauche de la Seine des bataillons de la landwehr de la garde rendus libres depuis la chute de Strasbourg, de manière à renforcer d'au moins une brigade l'infanterie attachée à la division de Rheinbaben.

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boite verte Marche du grand-duc de Mecklembourg sur Chartres et Dreux

En ce moment, le général d'infanterie grand-duc de Mecklembourg-Schwerin, qui, après Coulmiers, avait remplacé le général de Tann, faisait une forte reconnaissance dans l'Ouest, en attendant le prince Frédéric-Charles qui arrivait à marches forcées.
Battant l'estrade et tâtonnant de tous côtés, cherchant l'armée de la Loire là où elle n'était pas, il avait fouillé le pays jusqu'à Chartres prêt à remonter vers Dreux ou à se rabattre sur Orléans; tout à coup le 15 novembre il reçut de Versailles l'ordre de diriger la 17e division sur Rambouillet, pendant que le Ie corps bavarois se porterait sur Auneau.
Une dépêche coche verte du même jour plaçait sous ses ordres le général de Rheinbaben.
Ce mouvement sur Rambouillet et sur Auneau prouve que les Allemands avaient pris pour l'avant-garde d'une armée de secours le petit corps qui occupait Dreux, et que, malgré leurs espions et leur nombreuse cavalerie, ils n'étaient pas toujours très bien renseignés.

En réalité, notre ministre de la guerre, au lieu de songer à enlever le quartier général de Versailles, était bien plus préoccupé de couvrir le siége de la délégation de province; c'est pour ce motif qu'il avait formé lui-même ce long cordon de troupes qui garnissaient le Perche et la Beauce, et que ces divers corps échelonnés jusqu'à Dreux, sur leur gauche, recevaient de Tours des ordres directs, n'étaient aucunement reliés entre eux et ignoraient même leur existence réciproque.
Lorsque les Allemands virent que nos forces concentrées aux environs de Dreux ne continuaient pas leur mouvement en avant, ils résolurent d'aller les attaquer; car ils n'avaient pas oublié une des maximes de guerre du grand Frédéric, maxime à laquelle les débuts de la campagne n'avaient que trop donné raison.
Ils savaient que c'est à l'offensive qu'appartient la victoire: Dass in der Offensive der entscheidende Sieg liegt ;c'est le grand enseignement qu'ils ont tiré une fois de plus de la dernière guerre.

Le 16 novembre, la 17e division se porte de Rambouillet à Maintenon, pour marcher de là sur Dreux, de concert avec la 5e division de cavalerie qui a été renforcée par une brigade de la landwehr de la garde; coche verte tandis que la 22e division, le 1e corps bavarois et la 6e division de cavalerie reçoivent l'ordre de s'avancer le lendemain dans la direction de Châteauneuf.
Dans la journée du 16 novembre, les troupes du grand-duc Mecklembourg se trouvent donc échelonnées entre Chartres et Maintenon; le grand-duc a son quartier général à Épernon, et il l'établira le lendemain à Nogent-le-Roi.
C'est à la même date que le lieutenant général de Treskow, aide de camp du roi de Prusse et chef de son cabinet militaire, vint prendre à Maintenon le commandement de la 17e division qui occupait cette ville, avec son avant-garde et sa cavalerie à Nogent-le-Roi.
Dans l'après-midi du 16, une patrouille de nos chasseurs d'Afrique (sous-lieutenant Marochetti), partie de Dreux, rencontra les premiers éclaireurs du grand-duc aux environs de Villemeux, sur la route de Nogent-le-Roi; c'étaient des cavaliers du 11e régiment de uhlans, qui furent poursuivis jusqu'au delà de Chaudon; mais on était encore loin de s'attendre à une attaque prochaine.

En l'absence de toute cavalerie, ou d'une cavalerie suffisante pour s'éclairer, nos chefs militaires en étaient réduits aux rapports des populations ou des autorités civiles, lesquelles n'étaient que trop portées à exagérer les forces ennemies et à annoncer la présence d'un corps d'armée là où il n'y avait qu'un bataillon; en sorte que, pour ne pas tenir les troupes dans des alertes perpétuelles, on en était arrivé à ne plus croire que ses yeux.

Les forces dont le général du Temple disposait pour la défense de Dreux, consistaient, comme on l'a vu plus haut, en un bataillon de marins et cinq bataillons coche verte de mobiles, un petit nombre de chasseurs à cheval, gendarmes et francs-tireurs, en tout moins de 7000 hommes sans artillerie.

Dans la journée du 17 novembre, ces troupes furent réparties, de la gauche à la droite, dans les positions suivantes:
à Abondant, le 2e bataillon de la mobile de la Manche;
de Chérisy à la route de Nogent-le-Roi, en arrière du Luat-Clairet, le 1e bataillon du Calvados, ayant en avant de lui, à Sainte-Gemme, une compagnie de fusiliers-marins;
aux hameaux du Luat et de Nuisement, le 3e bataillon de la Manche, appuyé à sa droite vers la route de Chartres par deux compagnies de fusiliers-marins;
de la route de Chartres à la petite rivière de la Blaise, en avant de Vernouillet, le 3e bataillon du Calvados;
en seconde ligne, à Dreux, le 2e bataillon du même département.

A la droite du général du Temple se trouvaient: à Garnay, sur la rive gauche de la Blaise, le 4e bataillon de la mobile d'Eure-et-Loir et le 2e à Tréon sur la rive droite de la même rivière.
On doit noter toutefois que ces deux derniers bataillons n'appartenaient pas au corps de Dreux; ils faisaient partie de celui qui était établi à plusieurs lieues plus loin, vers Châteauneuf et Senonches, sous les ordres du lieutenant-colonel Marty.

Pour ne nous occuper que du corps du général du Temple, on voit qu'il était déployé d'Abondant à Vernouillet, s'appuyant par sa gauche à la forêt de Dreux et par sa droite à la rivière de la Blaise , couvrant à la fois les routes de Paris et de Chartres.
On sait qu'il devait être attaqué simultanément par ces deux routes, puisque les généraux de Treskow et de Rheinbaben avaient reçu l'ordre d'agir de concert contre Dreux.
Pour la durée de ce mouvement, le coche verte premier disposait de treize bataillons, de neuf escadrons et de six batteries, en tout treize à quatorze mille hommes et trente-six canons; le second avait sous ses ordres neuf bataillons, trente-six escadrons et quatre batteries, total une douzaine de mille hommes et vingt-quatre pièces d'artillerie.

Le 17 novembre, à neuf heures du matin, le général de Treskow arrive de Maintenon à Nogent-le-Roi avec le gros de sa division.
Il lance aussitôt son avant-garde sur Dreux, en longeant la rive gauche de l'Eure, et envoie en même temps une patrouille sur la rive droite de cette rivière, pour se mettre en communication avec la 5e division de cavalerie et la landwehr de la garde.
Depuis son départ de Maintenon, un escadron de hussards flanque sa marche sur sa gauche, passant par Néron, Ormoy, le Boullay-Mivoye, et se portant, par Marville, dans la direction du hameau d'Imbermais.
Le général ennemi paraît d'abord avoir l'intention de passer la rivière de l'Eure entre Villemeux et Ecluzelles, pour donner la main au général de Rheinbaben; mais en présence de la difficulté et du danger qu'il y aurait à franchir cette étroite vallée si près de nos cantonnements, il renonce à ce projet.
C'est pourquoi il fait appuyer sur sa gauche le gros de sa division, pour gagner la route de Dreux à Chartres, en se dirigeant de Chaudon sur Marville.
Vers une heure et demie, il occupe les positions suivantes: son avant-garde est à Charpont, et le gros de sa division un peu au nord de Marville; un de ses bataillons occupe Blainville et sa brigade de cavalerie se tient au sud de ce village.
Tandis que le général prussien prenait ces dispositions, on ignorait à Dreux sa présence aussi rapprochée, coche verte bien qu'à ce moment quelques coups de feu eussent déjà été tirés par nos avant-postes sur une patrouille de uhlans aux environs de l'église de Luray.
Sur des avis annonçant l'arrivée de l'ennemi à Nogent-le-Roi, le général du Temple s'était contenté de doubler les grand'gardes et de faire occuper le Luat et les petits bois de Vernouillet par des compagnies de fusiliers-marins.
Le reste de ses troupes s'occupait de distributions ou s'apprêtait pour des manoeuvres, lorsque, vers deux heures, la fusillade se fit entendre sur les hauteurs de Rieuville.
Bientôt la canonnade éclata dans la même direction, et, comme les nôtres n'avaient pas d'artillerie, il devenait évident que nos avant-postes étaient attaqués.
Aux premiers coups de feu, le général du Temple s'était porté à environ un kilomètre de Dreux, à l'embranchement des routes de Chartres et de Châteauneuf, où se trouvaient deux compagnies de marins (lieutenants de vaisseau Servan et Lemercier-Moussaux); il vit tout de suite qu'il avait affaire à des forces considérables, et ses troupes furent aussitôt réparties dans les positions que nous avons précédemment indiquées.

boite verte

boite verte Combats d'Imbermais, de Dreux et de Berchéres-sur-Vègre

Voici ce qui s'était passé sur la route de Chartres, où se trouvait le gros de la 17e division, sous les ordres du général-major de Kottwitz.
Les premiers éclaireurs ennemis venus pour fouiller le pays, ayant essuyé des coups de feu sur la lisière du bois de Chambléan s'étaient aussitôt repliés sur Blainville; peu après, une batterie à cheval, appuyée par deux escadrons du 11e uhlans, sous les ordres du colonel comte de Solms-Wildenfels, prenait position dans la plaine et couvrait d'obus le hameau et les bois de coche verte Chambléan; en même temps deux compagnies du 89e régiment de grenadiers mecklembourgeois, parties de Marville, pénétraient dans Imbermais, après avoir contourné ce hameau à l'est et au sud.
C'étaient les deux bataillons isolés, placés à la droite du général du Temple, qui allaient essuyer le premier choc.
Le commandant Bréqueville, du 2e bataillon d'Eure-et- Loir, cantonné à Tréon et au hameau de Fort-Ile, avait rassemblé à la hâte ses compagnies et était parti à leur tête, avec l'intention de cerner à Imbermais le faible détachement dont la présence lui avait été signalée; mais, dans le même moment, le lieutenant-colonel de Boehn, à la tête du bataillon de fusiliers du 76e régiment hanséatique, s'y dirigeait de son côté; et lorsque les mobiles débouchèrent des bois sur un front peu étendu et par un mauvais chemin de traverse, leur tête de colonne fut accueillie par une fusillade meurtrière partie des murs crénelés d'une ferme d'où les Mecklembourgeois tiraient à l'abri.
Les nôtres se rejetèrent aussitôt sur la lisière des bois et, bien que surpris par cette attaque, ils ripostèrent énergiquement mais, au bout d'un quart d'heure, les renforts du lieutenant-colonel de Boehn entrèrent en ligne, et les mobiles, ayant perdu leur chef de bataillon, furent forcés d'abandonner le terrain.
Dans ce court engagement, la compagnie d'Eure-et-Loir, qui formait l'avant-garde et qui seule avait pu se déployer, eut douze hommes tués et sept blessés.
Les autres compagnies furent ralliées, ramenées à Tréon, et prirent position sur la rive gauche coche verte de la Blaise sans être inquiétées par l'ennemi, qui, ayant atteint son but, se rabattit sur sa droite pour continuer à fouiller le terrain.
Le bois de Chambléan était occupé par une compagnie du 4e bataillon d'Eure-et-Loir (commandant de Castillon de Saint-Victor); pour l'en déloger, l'ennemi fit avancer une batterie, et les obus forcèrent bientôt les nôtres à repasser la Blaise, dans la direction de Garnay, vivement poursuivis par le lieutenant- colonel de Boehn, qui occupa le défilé.
Une autre compagnie du même bataillon, établie de grand'garde dans le bois des Cinq-Chênes, essaya de s'y maintenir malgré la disproportion du nombre mais le major de Koppelow, avec un demi-bataillon du 89e, s'avança sous la protection d'une batterie par la ferme des Yeux-Bleds sur l'Epinay, et, retranchés derrière les murs crénélés de ce hameau, les grenadiers mecklembourgeois refoulèrent les mobiles sur la route de Châteauneuf et le bois de Marmousse.
De cette nouvelle position, les nôtres dirigèrent encore sur l'ennemi, qui débouchait de l'Epinay, une fusillade soutenue; mais, assaillis de nouveau par les obus ils se virent bientôt contraints d'abandonner ces bois à l'ennemi.
Dans ces divers engagements, les 2e et 4e bataillons d'Eure-et-Loir avaient eu dix-huit hommes tués, dont deux officiers, le commandant Bréqueville et le capitaine Roche, dix-sept blessés et huit prisonniers ou disparus.

Tandis que sur notre droite les mobiles d'Eure-et-Loir étaient ainsi rejetés au delà de la Blaise, le colonel de Manteuffel, à la tête de l'avant-garde, s'était avancé sur notre gauche de Charpont jusqu'au village de Luray, qu'il trouva dégarni; vers trois heures coche verte de l'après-midi, il faisait attaquer le Luat-Clairet par le major de Gaza, commandant le 14e bataillon de chasseurs mecklembourgeois.
Le Luat n'était que faiblement gardé par une compagnie du 3e bataillon de la Manche, renforcée au début de l'action par une autre compagnie du même bataillon.
Après une courte mais vive résistance, les mobiles de la Manche durent abandonner le Luat pour occuper en arrière les bois de la Garenne, qui offraient une position plus avantageuse, et où se trouvait une partie du 1e bataillon du Calvados.
Presque aussitôt deux batteries, placées sur les hauteurs qui s'élèvent au sud du Luat, couvrent ces bois de leurs projectiles, et les mobiles sont encore une fois dans la nécessité de céder cette nouvelle position à l'ennemi.
Le 1e bataillon du 90e régiment mecklembourgeois pousse alors une pointe sur le hameau de Sainte-Gemme, mais bientôt il se replie devant l'énergique résistance des marins qui défendent ce point, et qui ne l'évacuent que sous le feu d'une nouvelle batterie vomissant ses obus des hauteurs du village de Saint-Denis-de-MoronvaI.
Pendant cette attaque du colonel de Manteuffel et de-l'avant-garde sur notre gauche, le gros de la division ennemie portait son principal effort contre notre centre, à Nuisement et à Rieuville.
Le hameau de Nuisement, ainsi qu'on l'a dit plus haut, était occupé par le reste du 3e bataillon de la Manche, qui s'étendait par sa droite jusqu'à la route de Chartres, où il était appuyé par les deux compagnies de marins postées là dès le début de l'action.
C'est sur ce point que se concentre la résistance.
Sur l'ordre du général de Treskow, un bataillon du 89e régiment de grenadiers mecklembourgeois, couvert par une longue ligne de coche verte tirailleurs, s'avance pour attaquer Nuisement; à cette vue, les braves marins de l'équipage de "la Gauloise" veulent s'élancer à la baïonnette;
mais chaque fois qu'ils essayent de déboucher de leurs positions, une grêle d'obus les force à y rentrer.
Croyant avoir aperçu nos cavaliers dans la direction du Luat, le général prussien y lance aussitôt sa brigade de cavalerie protégé par le feu de son artillerie, le major de Zeuner, à la tête du bataillon mecklembourgeois du 89e, continue sa marche sur les plantations qui s'étendent au sud-est de Nuisement;
déjà ses tirailleurs, derrière lesquels s'avancent des compagnies serrées en masse, vont atteindre le hameau; nos marins, qui ne tirent plus, les laissent s'approcher jusqu'à la lisière des jardins et les reçoivent tout à coup par une décharge meurtrière qui éclaircit les rangs ennemis; mais d'autres tirailleurs se détachent des réserves et ne tardent pas à remplacer ceux qui sont mis hors de combat.
Les mobiles du 3e bataillon de la Manche, bien qu'armés de mauvais fusils à piston, n'en soutiennent pas moins énergiquement la lutte; et le capitaine de Mons, qui leur donne l'exemple, tombe à leur tête mortellement frappé.
Menacés d'être enfermés dans ce cercle de feu qui va se rétrécissant, nos soldats, après avoir tenu quelque temps l'ennemi en échec, évacuent Nuisement et se replient au nord dans la direction de Rieuville, poursuivis par les volées de l'artillerie et menacés sur leur gauche par les chasseurs qui débouchent du Luat.
Notre centre étant ainsi refoulé, le général de Treskow s'avance avec le gros de ses forces par la route de Chartres, ayant à sa gauche son infanterie serrée en masse, à coche verte sa droite et à la même hauteur son artillerie.
Cependant le général du Temple avait appelé à lui deux autres compagnies de fusiliers, conduites par le lieutenant de vaisseau Picot;
nos marins s'embusquent dans un petit bois qui borde la route de Chartres, un peu en arrière de Nuisement; sur l'ordre de leur; chefs, ils laissent approcher, sans tirer, les premiers cavaliers ennemis;
le commandant du 2e bataillon du 89e régiment mecklembourgeois, qui forme la tête de colonne, croit ces bois inoccupés et marche d'assurance;
mais, arrivé à environ deux cents pas, il s'aperçoit de sa méprise, et, se retournant vers sa troupe, il fait commencer le feu;
nos marins y répondent par une décharge meurtrière tous les Mecklembourgeois tourbillonnent et tombent les uns sont mortellement atteints et mordent la poussière;
la chute des autres n'est qu'une ruse ils attendent, pour se relever, que leur artillerie les ait dégagés.
L'aplomb de ces trois ou quatre cents hommes qui attendent de pied ferme le gros d'une division frappe l'ennemi d'étonnement; le général de Treskow voit bien qu'il a affaire à des troupes solides et bien commandées: Dass man es hier mit einer tüchtigen und gut geführten Truppe zu thun habe.
Pour vaincre leur résistance, il fait avancer deux batteries et couvre le bois de projectiles; pendant vingt minutes, nos marins combattent sous une véritable pluie de fer et de plomb.
Heureusement ce tir, mal dirigé, passe au-dessus de leurs têtes, et le général du Temple, qui est à cheval au premier rang, essuie, sans être atteint, plusieurs coche verte coups de mitraille.
Sur notre gauche, une autre batterie établie près de Nuisement canonne à outrance nos troupes en retraite sur Rieuville.

C'est en vain que de ce côté le commandant de Labarthe, de la garde mobile du Calvados, essaye, par un retour offensif, de regagner le terrain perdu; c'est en vain que nos énergiques marins, auxquels leurs chefs donnent l'exemple, veulent prolonger la lutte malgré les pertes sérieuses qu'ils ont subies; le général de Malherbe, accouru de Nonancourt au bruit du canon, juge la résistance désormais impossible, et donne le signal de la retraite.
Il est quatre heures et demie; c'est assez d'avoir tenu en échec pendant plus de deux heures des forces doubles des nôtres et une nombreuse artillerie, à laquelle nous n'avons à opposer que de mauvais fusils.
Nos troupes se rallient sur le talus du chemin de fer et se replient sur Nonancourt, pendant que l'ennemi se masse sur les hauteurs de Rieuville .
Le général du Temple forme l'arrièregarde avec son bataillon de fusiliers-marins, qu'il est forcé d'arracher au combat la contenance de cette belle troupe en impose tellement à l'ennemi, qu'il n'ose la poursuivre ni même la suivre, et se borne à saluer son départ par des hurrahs de triomphe.
Le général de Treskow paraît si impressionné, qu'il ne veut pas faire son entrée à Dreux avant de s'être assuré de sa complète évacuation par nos soldats.
Il fait mander le maire à l'entrée de la ville, et quand, sous la menace d'un bombardement, il a obtenu de lui l'assurance que le dernier des défenseurs en est parti, il la fait occuper par son avant-garde, attendant la nuit pour y entrer lui-même.
Dans cette journée, les pertes de l'ennemi, constatées coche verte par nos propres ambulances, furent de sept tués et de quarante-huit blessés, appartenant, pour la plupart, au 89e régiment mecklembourgeois qui avait essuyé le feu de nos marins.
Nos troupes, en y comprenant les mobiles d'Eure-et-Loir, comptèrent trente-quatre tués, dont trois officiers, et une soixantaine de blessures sérieuses.
L'ennemi ne nous fit que quelques rares prisonniers, et, pour en grossir le nombre, il enleva dans nos hôpitaux une vingtaine de convalescents précédemment blessés à Epernon à Chérisy et dans la catastrophe des Cinq-Chênes.
Si le général du Temple put soutenir pendant plus de deux heures une lutte aussi disproportionnée, et si le général de Malherbe put opérer sans encombre sa retraite sur Nonancourt , ils le durent principalement à une circonstance tout à fait fortuite qui se produisit sur leur gauche au moment même du combat de Dreux, et qui empêcha le général de Rheinbaben d'y prendre part.

Notre corps d'observation de la vallée de l'Eure se composait, à la date du 17 novembre, des régiments de la mobile de l'Ardèche et de l'Eure, du 6e bataillon de la Loire-Inférieure, des éclaireurs de Normandie et des francs-tireurs de l'Eure, du Puy-de-Dôme et de Seine-et-Oise, en tout sept à huit mille hommes récemment armés de fusils Snider ou Chassepot; il était placé depuis quelques jours sous les ordres du lieutenant-colonel Thomas, de la mobile de l'Ardèche, lequel avait remplacé le colonel Mocquard, retourné avec son régiment sur la rive droite de la Seine.
Le colonel Thomas, qui avait placé le centre de son commandement à Aigleville, avait pour mission coche verte d'occuper la ligne de Vernon à Pacy-sur-Eure et Ivry-la-Bataille, et de maintenir l'ennemi au delà de la rivière de l'Eure, sans chercher, de son côté, à la franchir.
Chaque jour les reconnaissances et les patrouilles échangeaient des coups de fusil dans cette contrée, notamment à la Belle-Côte, à Boissy-Mauvoisin, a Bréval et à Gilles, où les mobiles et les francs-tireurs malmenaient les patrouilles des 10e et 11e hussards qui éclairaient la brigade de Redern.
Les gardes nationaux de Rouvres, de Saint-Ouen et de Berchères s'étaient mis de la partie, et, grâce à leur connaissance du terrain, ils inquiétaient sérieusement les fourrageurs.

Le 16 novembre, à la suite d'une chasse qu'ils leur avaient donnée, ces gardes nationaux demandèrent aux mobiles, cantonnés à Ivry-la-Bataille, et chargés d'empêcher les réquisitions dans la vallée basse de la Vègre, un appui qui leur fut promis pour le lendemain.

Le 17 novembre, la 1e compagnie du 2e bataillon de l'Ardèche, partie d'Ivry-la-Bataille en reconnaissance, poussait jusqu'au hameau de Marchefroy, où elle s'arrêtait vers dix heures du matin.
Là, elle envoyait à la découverte une patrouille d'une douzaine d'hommes, qui, contournant les vallons et passant par Berchères et la Ville-l'Evêque, arrivait par le bois de la Butte et le hameau de la Fosse-Louvière, en face des avant-postes de la brigade de Barby.
En même temps, les gardes nationaux de Rouvres et des environs s'avançaient par le bois d'Illiers , traversaient la Vègre au moulin de Billy, puis se portaient vers le hameau du Cornet, en traversant celui de Biennouvienne.
A mesure que les mobiles et les gardes nationaux s'approchaient, les vedettes ennemies coche verte se repliaient, tirant de temps à autre un coup de pistolet comme signal.
Ces cavaliers étaient les mêmes uhlans hanovriens qui avaient perdu quelques-uns des leurs aux environs de Bu, les 14 et 15 novembre; c'étaient eux qui avaient alors donné l'alarme au général de Rheinbaben, et, depuis cette époque, ils n'avaient pas débridé.
Ils étaient cantonnés au hameau de Brunel, au sud de Gressey, couverts par une grand'garde établie au hameau des Friches et par, des vedettes échelonnées de Saint-Lubin-de-la-Haye au Cornet.
Le général de Rheinbaben prenait ses dispositions pour appuyer à Dreux le général de Treskow, lorsque la présence de nos mobiles et de nos gardes nationaux lui fut signalée.
Averti le premier à Richebourg, le général de Barby se mit aussitôt sur ses gardes, comme s'il allait avoir sur les bras toutes nos forces réunies de la rive gauche de la Seine.
Cependant le seul renfort arrivé aux nôtres dans cet intervalle était la section des francs-tireurs de l'Iton (capitaine Houdellierre), forte de vingt-huit hommes.
Ces francs-tireurs, campés sur la côte Robin, à l'est de Rouvres, avaient aperçu ce qui se passait, et, traversant la vallée, ils étaient venus s'établir, vers midi, dans le bois de la Butte.
En ce moment, on n'entendait plus que quelques rares coups de fusil.
Les uhlans du 13e régiment s'étaient retirés en arrière de Brunel; les gardes nationaux occupaient le hameau des Friches, et les mobiles la ferme de Biennouvienne.
Vers une heure de l'après-midi, le général de Barby, arrivé avec des renforts et ayant eu tout le temps de reconnaître la faiblesse numérique de ses adversaires, prend tout à coche verte coup une vigoureuse offensive.
Il dirige sa cavalerie, 13e uhlans et 9e dragons, sur le Méziard, la landwehr de la garde sur Biennouvienne tandis qu'il fait ouvrir le feu par son artillerie, mise en batterie sur les hauteurs du Cornet.
Aux premiers coups de canon, les nôtres, qui croyaient n'avoir affaire qu'à quelques uhlans, s'aperçoivent que la lutte est impossible; ils battent en retraite, en continuant toutefois à tirailler; les gardes nationaux de Rouvres se replient par Billy et Berchères; ceux de la Ville-l'Evêque et les mobiles se retirent en plaine dans la direction de la Fosse-Louvière, en se couvrant de tous les obstacles qu'ils rencontrent.
Les landwehriens fouillent les fermes de Biennouvienne et du Cornet et y font une razzia de tous les hommes valides qui sont gardés à vue au hameau de la Mare.
Les douze mobiles de l'Ardèche, qu'accompagnait encore une dizaine de gardes nationaux de Berchères et de la Ville-l'Évêque, ont gagné la lisière du bois de la Butte où se trouvent les francs-tireurs de l'Iton.
Le feu a cessé, et l'on pourrait croire l'escarmouche terminée mais ce n'est qu'un moment de répit pendant lequel le général de Barby prend ses dispositions pour déloger les nôtres de la retraite qu'ils ont choisie.
Vers trois heures, les mobiles aperçoivent, de la ferme de la Ville-l'Évêque, une patrouille de quelques cavaliers, qui vient éclairer les hauteurs de Berchères; ils préviennent le corps franc de l'Iton, et aussitôt mobiles et francs-tireurs s'élancent à la poursuite des uhlans jusqu'aux abords du village; mais quelques minutes se sont à peine écoulées qu'un escadron les prend en flanc et les charge avec furie; il s'engage alors entre cette poignée d'hommes et la coche verte cavalerie ennemie une mêlée terrible et un combat corps à corps sans trêve ni merci.
Un instant dégagés, nos soldats croient à l'arrivée d'un renfort; ils ont aperçu sur leur gauche une troupe d'infanterie; mais, hélas! ce sont les landwehriens du général de Loën, dont ils essuient les décharges, puis un second escadron qui les attaque plus vivement encore que le premier.
Chacun des nôtres soutient, à lui seul, un combat.
Dans un bouquet de bois, près de Berchères, le lieutenant des francs-tireurs, entouré de quelques hommes, résiste avec énergie aux assauts successifs des cavaliers; un officier des uhlans hanovriens, le second lieutenant de Wedel, l'aperçoit et s'apprête à le charger; mais le terrain est détrempé, les abords sont difficiles, les uhlans hésitent "Que les braves me suivent" s'écrie leur chef, et, le sabre levé, il se précipite à la tête de ses cavaliers, lorsque, arrivé à dix pas du lieutenant Vivier, qui le tient en joue, il tombe pour ne plus se relever, la poitrine traversée par une balle.
Au même moment, un coup de feu étend sur le carreau l'officier des francs-tireurs, et sa victime, touchée de tant de bravoure, défend aux uhlans de l'achever.
A l'exemple du lieutenant Vivier, chacun de nos soldats accomplit des prodiges de valeur; mais il n'en reste plus debout que trois ou quatre, qui luttent d'un suprême effort près d'un bouquet de bois, aux abords du cimetière de Berchères, à l'endroit même où s'éleva plus tard le monument consacré à leur mémoire; ils s'y font tous tuer en combattant jusqu'au dernier soupir: bis zum letztem Athemzuge.
Pendant coche verte ce temps, le capitaine Houdellierre séparé de sa troupe, avait échappé comme par miracle à plusieurs feux de peloton, après avoir été longtemps poursuivi et traqué dans les bois comme une bête fauve.
Dans cette mêlée, il n'y eut en réalité d'engagés que vingt-sept francs-tireurs, douze mobiles et quelques gardes nationaux, en tout moins de cinquante hommes, et la preuve de l'énergie qu'ils déployèrent se trouve dans les pertes mêmes qu'ils subirent treize d'entre eux furent tués ou mortellement atteints; vingt-trois autres criblés de blessures; les francs-tireurs survivants en comptent ensemble plus de cent, et un mobile de l'Ardèche reçut à lui seul dix-sept coups de lance.
L'acharnement des uhlans hanovriens s'explique jusqu'à un certain point par la mort d'un de leurs officiers et la perte de quelques-uns de leurs camarades; mais rien ne saurait justifier la cruauté de l'infanterie prussienne, qui n'eut que trois ou quatre blessés, et qui déshonora encore cette journée par de nombreux assassinats.
Le combat terminé, les landwehriens du 2e régiment de grenadiers de la garde entrent à la ferme de la Ville-l'Evêque, où les mobiles s'étaient arrêtés le matin, traînent le malheureux fermier et trois ouvriers inoffensifs dans un champ voisin et les y massacrent sans pitié; puis, avant de rentrer dans leurs cantonnements, ils égorgent froidement, à la ferme de la Mare, neuf habitants sans armes qui n'ont pris aucune part à la lutte.
Triste et hideuse boucherie, qu'un auteur allemand n'a pas craint de présenter comme une charge à la baïonnette : die Garde-Landwehr greift mit dem Bajonet die linke Flanke an.
coche verte Le combat de Berchères, dans lequel une poignée de braves gens occupa toute une journée la 5e division de cavalerie allemande, est un fait d'armes aussi beau par lui-même que par ses résultats.
D'après les ordres qu'il avait reçus la veille du grand-duc de Mecklembourg, le général de Rheinbaben devait, tout en surveillant la Seine, réunir à Houdan ses forces disponibles et refouler jusqu'à Dreux les détachements français qu'il rencontrerait.
Il ne fit de ce côté aucun mouvement sérieux dans la journée du 17; il se contenta d'envoyer sur la route de Dreux une reconnaissance composée d'un bataillon du 1e régiment de la landwehr de la garde, de deux escadrons du 16e uhlans et d'une section d'artillerie.
Le gros de cette reconnaissance s'arrêta à Marolles, et les uhlans seuls poussèrent jusqu'à nos avant-postes de Chérisy, où ils perdirent un des leurs.

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boite verte Rencontres de Gilles et de Châteauneuf (17 novembre)

Le même jour, une patrouille du 11e hussards se présenta de nouveau à Gilles et fut reçue par les francs-tireurs du Puy-de-Dôme, qui abattirent un cheval et blessèrent le cavalier.
Les rencontres qui avaient eu lieu à Bu les 14 et 15 novembre, avaient fait supposer au général de Rheinbaben que la forêt de Dreux était fortement occupée; le combat de Berchères lui fit croire à une attaque sérieuse de notre corps de l'Eure, attaque à laquelle il craignit de prêter le flanc.
Sans doute, l'issue de la journée du 17 dut lever tous ses doutes à cet égard; mais, pendant ce temps, la retraite de nos troupes sur Nonancourt avait pu s'effectuer sans encombre.
Ce fut seulement dans la matinée du 18 novembre que le général de Rheinbaben fit son entrée à Dreux, avec les brigades de Bredow, de Barby et celle de la landwehr de la garde.
Il fut chargé coche verte de poursuivre le corps du général du Temple, qui, depuis la veille au soir, se trouvait sous les ordres directs du général de Malherbe.
Quant au grand-duc de Mecklembourg, qui avait son quartier général à Nogent-le-Roi et qui occupait la ligne de Châteauneuf à Dreux, il fit exécuter à ses troupes une conversion à gauche, la 22e division formant le pivot et la 17e l'aile marchante, avec le 1e corps bavarois en réserve.
L'intention du grand-duc était de poursuivre sa reconnaissance dans la direction de Tours, afin de s'éclairer sur l'état de nos forces.
Il allait ainsi envelopper et refouler successivement les diverses troupes que des ordres directs du ministre de la guerre avaient disséminées en avant des forêts du Perche.
Le premier corps qu'il rencontra était commandé par le lieutenant-colonel Marty, ancien major de place; il avait à peu près la même force et la même composition que celui du général du Temple, et il était établi, depuis quelque temps, à la Ville-aux-Nonains et aux environs, en avant de la forêt de Senonches, dans des positions que l'on avait rendues formidables au moyen de coupures et d'abatis.
La marche de l'ennemi sur Dreux avait fait malencontreusement sortir le colonel Marty de ses défilés inextricables, et, à la date du ]7 novembre, il occupait, entre les forêts de Chateauneuf et de Senonches, une ligne qui s'appuyait par sa droite à la rivière de l'Eure et par sa gauche à la Blaise; il s'était établi à Saint-Maixme, avec trois compagnies du 3e bataillon du 36e de marche; le 1e bataillon du même régiment (commandant Senaux) était détaché sur la droite, vers la Loupe; trois compagnies du 3e bataillon coche verte (commandant Perrot) étaient cantonnées à Digny, et le 2e bataillon (commandant Laflaquière), envoyé d'abord comme renfort sur ce dernier point, fut ensuite dirigé sur Saint-Ange-Torçay, où il arriva dans la nuit du 17 au 18, après une marche longue et pénible.
Le commandant Laflaquière avait reçu l'ordre de se poster, avant le jour, sur la lisière de la forêt de Châteauneuf, d'observer la route de Dreux, et de résister le plus énergiquement qu'il pourrait aux attaques probables de l'ennemi.
Ces bataillons du 36e de marche, qui formaient le noyau du corps de Senonches, devaient être plus ou moins reliés entre eux par des mobiles et des francs-tireurs éparpillés sur une étendue hors de proportion avec leur effectif, ils n'auraient pu, dans les circonstances ordinaires, résister une heure aux forces qu'ils avaient devant eux; mais un brouillard intense, qui régna pendant toute la journée du 18, déroba au grand-duc la faiblesse numérique de ses adversaires, et permit à nos corps isolés et incohérents d'arrêter jusqu'au soir la marche de son armée.
Déjà, dans la journée du 17, au moment du combat de Dreux, quelques coups de feu avaient été échangés, sur la lisière de la forêt de Châteauneuf, entre nos avant-postes et les éclaireurs ennemis; dans une de ces rencontres, des cuirassiers du régiment de Brandebourg n°6 furent blessés ou démontés près de la ville de Châteauneuf, que l'artillerie du général de Schmidt nous força d'abandonner.
Plus au sud, sur la route de Chartres à Nogent-le-Rotrou, les cavaliers du 16e régiment de hussards allèrent se heurter, à Landelles, contre un poste des mobiles de l'Orne, qui leur tint tête énergiquement et leur fit coche verte tourner bride après leur avoir tué ou blessé une dizaine d'hommes.

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boite verte Combats de Torçay, d'Ardelles et de Digny

Dans la journée du 18, le grand-duc de Mecklembourg eut encore à livrer quelques combats isolés, à Torçay, à Ardelles et à Digny; mais c'est à Torçay qu'il rencontra la plus sérieuse résistance.
Arrivé dans ce hameau vers trois heures du matin, le commandant Laflaquière avait pris immédiatement ses dispositions de défense, envoyé des guides à la découverte et reconnu l'extrémité nord de la forêt de Châteauneuf.
Cette partie de bois, nommée la Queue-de-Fontaine, s'étend de Chateauneuf à Fontaine-les-Ribouts, en suivant une gorge assez profonde qui n'offre, dans toute sa longueur, que deux passages praticables à l'artillerie et à la cavalerie, ceux de Saint-Jean-de-Rebervillers à Épineux, et de Morvillette à Torçay.
C'est ce dernier défilé que le commandant Laflaquière était particulièrement appelé à défendre.
II fit fouiller la forêt, et, avant l'aube, il porta sur la lisière, en face des hameaux de Criloup et de Morvillette, les 3e et 6e compagnies de son bataillon; il posta les 2e et 4e dans deux bouquets de bois qui commandent le pont et le ravin de Saint-Vincent, avec l'ordre de défendre solidement cet important passage et de recueillir, le cas échéant, les compagnies placées en première ligne; enfin, les deux dernières furent tenues en réserve dans le hameau même de Torçay, d'où elles détachèrent de petits postes pour surveiller l'ennemi.
L'effectif total de ces six compagnies était d'environ neuf cent cinquante hommes.
Le général de Wittich, qui, pendant le combat de Dreux, se tenait en communication à Tréon avec le coche verte général de Treskow, avait établi son quartier généra] et le gros de sa division à Marville; il occupait, en outre, Boullay-les-Deux-Églises, Saint-Sauveur, Morolieu et la Touche.
Son avant-garde s'étendait sur une ligne allant de Levasville à Mondétour elle se composait du 94e régiment d'infanterie de Thuringe "grand-duc de Saxe", de trois escadrons du 13e hussards et deux batteries; elle était commandée par le lieutenant-colonel d'Heuduck, du 13e hussards.
Dans la nuit du 17 au 18, au moment même où le 2e bataillon du 36e de marche arrivait à Torçay, le général de Wittich recevait l'ordre de s'avancer sur la Loupe, suivi par le Ie corps bavarois.
Mais, entre sept et huit heures du matin, ses éclaireurs essuyèrent, sur la lisière de la forêt, des coups de feu qui lui donnèrent l'éveil.
Cette attaque ne lui permettait guère de se mettre en marche en laissant la Queue-de-Fontaine occupée sur ses derrières; c'est pourquoi il donna l'ordre au lieutenant-colonel d'Heuduck de se porter sur Morvillette et Criloup, de nous attaquer, de chercher à nous faire des prisonniers et de nous poursuivre jusqu'à la Blaise.
Il le fit appuyer par le 83e régiment et une batterie, qui se portèrent de Boullay-les-Deux-Églises sur Levasville; il fit observer Saint-Jean-de-Rebervilliers par un bataillon et un peloton de hussards qui occupaient Saint-Sauveur, se tenant prêt lui-même à marcher sur Levasville avec le reste de sa division.
Vers neuf heures, l'action s'engagea entre les 1e et 2e bataillons du 94e régiment de Thuringe et les 3e et 6e compagnies du 36e de marche, postées sur la lisière de la forêt.
Après avoir contenu quelque temps des forces cinq ou six fois supérieures, ces deux coche verte compagnies furent forcées d'abandonner les positions qu'elles occupaient.
Elles se replièrent sur les 2e et 4e compagnies (capitaines de Castelnau et Malard), qui défendaient le pont et le ravin de Saint-Vincent, et la résistance que l'ennemi rencontra sur ce point le força de cesser le feu après une heure et demie de combat.
Profitant de ce répit, le commandant Laflaquière forme sa ligne de bataille et envoie reconnaître Saint-Jean-de-Rebervilliers par la 6e compagnie, qui trouve ce dénié occupé et se replie sur le bataillon après avoir essuyé une vive fusillade.
Menacé d'être tourné sur sa droite par ce dernier village, et sur sa gauche par celui de Fontaine-les-Ribouts, n'ayant reçu aucune communication ni aucun renfort du colonel Marty, et ne pouvant compter que sur ses propres ressources, le commandant Laflaquière poste une section derrière des murs en pisé qui flanquent les abords de Torçay, renforce la gauche de ses tirailleurs et déploie en seconde ligne sa 6e compagnie.
A onze heures, l'ennemi dirige sur toute l'étendue de notre front une attaque générale.
La 22e division tout entière est mise en mouvement: le lieutenant-colonel d'Heuduck, avec la 43e brigade, continue ses efforts contre la partie nord de la Queue-de-Fontaine, tandis que le général de Wittich, avec le reste de ses troupes, se dirige par Saint-Sauveur sur Châteauneuf, où sa tête de colonne arrive vers midi.
La situation des défenseurs de Torçay devient de plus en plus critique menacés sur leur droite par le mouvement du général de Wittich qui va leur couper toute retraite, ils ont à contenir de front la brigade d'Heuduck; celle-ci porte tous ses efforts sur le ravin coche verte de Saint-Vincent, sur les deux bouquets de bois qui commandent le défilé, et aussi sur le nord du village de Torçay, qui lui paraît plus accessible, Fontaine-les-Ribouts étant en son pouvoir.
Un instant, notre ligne de tirailleurs cède le terrain de ce côté, et déjà les fusiliers ennemis couronnent la crête du ravin; mais, aussitôt, notre seconde ligne de tirailleurs va renforcer la première, et ce retour énergique rejette les Allemands dans les bois.
Néanmoins, malgré leur bravoure, nos soldats auraient été tous cernés et pris sans plusieurs circonstances fortuites auxquelles ils durent leur salut.
Le général de Wittich voulait attendre et rallier à Châteauneuf la brigade d'Heuduck; il se rendit même à Tbimert, où se trouvait en ce moment le grand-duc de Mecklembourg, pour lui faire part de son intention mais il reçut de lui l'ordre de continuer sa marche sur Digny avec le reste de sa division et la cavalerie de Schmidt, sans attendre l'issue du combat de Torçay.
Ce danger conjuré sur leur droite, les nôtres échappèrent également au danger, non moins grand, qui les menaçait sur leur gauche.
Le général de Treskow, qui marchait de Dreux sur Brezolles, était arrivé à peu près à mi-chemin, lorsque, vers midi, à la hauteur des Ormes, il entendit la fusillade qui éclatait entre les routes suivies par sa division et celle du général de Wittich; il se berça de l'espoir de nous avoir complétement cernés : Zu der Hoffnung berchtigt war den Feind vollkommen eingeschlossen zu haben".
Aussitôt il lance son avant-garde, composée de trois bataillons et d'une batterie, ainsi que sa brigade coche verte de cavalerie, jusqu'au sud de Boutry.
De là, une reconnaissance du 18e de dragons se dirige sur Fontaine-les-Ribouts pour tâcher de se mettre en communication avec la division de Wittich; mais elle est reçue à coups de fusil par les fantassins du 94e régiment, qui s'imaginent avoir affaire à nos propres cavaliers.
Les dragons, de leur côté, ayant eu un homme tué et cinq blessés dans cette rencontre, croient que le village est occupé par nous et s'abstiennent de renouveler leur tentative.
Cependant, vers deux heures, le commandant Laflaquière, complétement isolé, sans autre secours que celui du brouillard qui cachait la faiblesse de son effectif, et voyant ses munitions presque épuisées, dut se résoudre à opérer sa retraite.
Il replia ses tirailleurs sur les ailes, afin de démasquer les petites réserves du village dont le feu nourri tint l'ennemi en respect, et, vers trois heures, il évacua Torçay et gagna Blévy avec ce qui lui restait de son bataillon, sans être autrement inquiété que par quelques rares coups de fusil.
Cette retraite fut d'ailleurs couverte, jusqu'au dernier moment, par une section (sous-lieutenant Puginié) dont les hommes furent en grande partie tués, blessés ou pris.
De Blévy, le commandant Laflaquière dut se porter plus en arrière, à Maillebois, où il apprit l'occupation de Saint-Maixme et de Jaudrais par l'ennemi il se retira ensuite sur Brezolles, passant ainsi impunément devant tout le front de la division de Treskow, puis sur Verneuil, d'où il rejoignit plus tard le colonel Marty.
Dans le combat de Torçay, le 2e bataillon du 36e de marche avait perdu trente-sept hommes tués, quatre coche verte vingt-douze blessés et une centaine de prisonniers ou disparus.
Parmi les tués, se trouvaient le capitaine Malard et le sous-lieutenant Thynus; ils avaient héroïquement disputé le terrain à l'ennemi et étaient tombés dans le passage même qu'ils avaient mission de défendre, à l'endroit où la piété des habitants de Saint-Ange-Torçay a élevé depuis un monument à leur mémoire.
Le 94e régiment allemand, qui prit à cette affaire la part la plus sérieuse, accuse treize hommes tués, parmi lesquels l'enseigne porte-épée de Bülow, et vingt-cinq blessés.
Si, dans ce combat, nos pertes furent réellement supérieures à celle de l'ennemi, il n'y a là rien d'extraordinaire dans les conditions où nous nous trouvions, puisque six compagnies françaises avaient tenu bon pendant cinq heures contre une brigade allemande; toutefois, le capitaine prussien qui commandait les fusiliers du 94e à l'attaque de Torçay, et qui a écrit plus tard l'historique de son régiment, en a tiré les conséquences tout à fait inverses.
D'après cet officier, le commandant Laflaquière, attaqué de front par la brigade d'Heuduck, menacé sur sa droite par le reste de la division de Wittich, et sur sa gauche par l'avant-garde et la cavalerie du général de Treskow, aurait eu l'avantage de la position et du nombre: in günstiger Stellung und an Zahl überlegen war.
Cette assertion est au moins aussi ridicule que l'exagération qu'il nous reproche à propos de l'évaluation des pertes allemandes.
La même remarque peut s'appliquer à l'ordre du jour daté du 19 novembre, par lequel le grand-duc félicite les troupes qui ont pris part au coche verte "brillant combat de la veille, et qui, sans le secours de l'artillerie, ont enlevé Torçay à coups de crosse et de baïonnette."
Les Prussiens se sont, en effet, servi dans Torçay de la crosse et de la baïonnette, mais contre un traînard qui s'était réfugié dans une grange et qui y fut massacré après l'action.
Quant à la prise du village par les Allemands, sans que leur artillerie l'eût préalablement réduit en cendres, c'est une circonstance assez extraordinaire, il est vrai, pour qu'elle mérite d'être citée; mais la cause en est dans le brouillard et non dans leur courage, et cela, dans tous les cas, n'enlève rien au mérite de la défense, l'un des beaux et consolants faits d'armes qui se soient accomplis au milieu de nos désastres.
Au sud de la forêt de Châteauneuf, à Ardelles, à la Ferme-Neuve et à Château-Traîneau, le général de Wittich rencontra la même résistance.
Les têtes de colonnes du Ie corps bavarois, qui se trouvait en réserve, furent forcées d'entrer en ligne et de se frayer un passage les armes à la main au Gland, à Ardelles et à Digny.
Ce dernier point était occupé par la moitié du 3e bataillon du 36e de marche (commandant Perrot), appuyé par un bataillon de mobiles de la Mayenne.
Le commandant Perrot s'y maintint énergiquement depuis trois heures jusqu'à six heures du soir; mais, menacé d'être cerné le lendemain, il se retira dans la nuit sur Senonches, ayant eu dans cette affaire deux soldats tués et six blessés, dont un officier.
Quant aux Allemands, ils avaient perdu, dans ces divers engagements, quatre hommes tués et une coche verte vingtaine de blessés, parmi lesquels un officier.

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boite verte Retraite des corps d'Eure-et-Avre et de Senonches

Malgré la retraite des nôtres sur Senonches, ils n'osèrent occuper Digny, et se replièrent sur Ardelles, où ils se retranchèrent pour passer la nuit.
Là, comme à Torçay, un brouillard épais ne leur avait pas permis de compter le petit nombre de leurs adversaires; ce fut seulement le lendemain qu'ils s'aperçurent de leur erreur, et ils la firent expier chèrement aux habitants par les réquisitions et le pillage.

En résumé, dans cette journée du 18 novembre, des bataillons incohérents et abandonnés à eux-mêmes, ayant un effectif total de sept à huit mille hommes, avaient tenu en échec les cinquante mille hommes du grand-duc de Mecklembourg.
La cavalerie de la 17e division allemande, tous les régiments de la 22e, le 4e bataillon de chasseurs et le 13e régiment du corps bavarois avaient été engagés.
Le général de Treskow, qui devait coucher à Brezolles , était forcé de s'arrêter à Laons ; le général de Wittich , qui avait l'ordre de s'avancer jusqu'à Belhomert , était tenu en échec à Digny ; les Bavarois seuls, se piquant d'honneur depuis Coulmiers, avaient occupé les cantonnements qui leur avaient été désignés à Jaudrais, Ardelles et Favières.
La réserve se trouvait ainsi enchevêtrée dans la 22e division et en partie en première ligne.
Aussi le grand-duc dut-il employer la journée du 19, moins à se reposer de "son brillant combat" qu'à rétablir l'ordre dans sa marche.
Tandis que le grand-duc de Mecklembourg se rabattait ainsi de Nogent-le-Roi sur Châteauneuf-en-Thymerais pour marcher, les jours suivants, sur Digny, la Loupe et Nogent-le-Rotrou, le général de Rheinbaben se mettait à la poursuite de notre corps coche verte d'Eure-et-Avre.
Surpris, pour ainsi dire, dans la matinée du 18 novembre à Nonancourt, au milieu du brouillard, les nôtres continuèrent précipitamment, et presque sans s'arrêter, leur retraite sur Tillières, Verneuil et Laigle, où ils arrivèrent dans la soirée du 19 sans avoir essuyé d'autre perte que celle de quelques traînards tombés aux mains de l'ennemi.

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boite verte Rencontres de Saint-Remi-sur-Avre, de Marcilly-sur-Eure et de Gilles (18 novembre)

Entrés à Nonancourt le 18, après avoir essuyé à Saint-Remi-sur-Avre et à Saint-Lubin-des-Joncherets quelques coups de feu tirés par l'arrière-garde du général de Malherbe, les Prussiens tuèrent ou blessèrent plusieurs employés du chemin de fer, saccagèrent la gare, la brûlèrent en partie, et mirent au pillage les maisons voisines.
C'étaient les cavaliers de la brigade de Bredow qui exerçaient de nouvelles représailles pour la perte d'un sous-officier du 13e dragons tué dans la matinée.
Dans la même journée, le général de Rheinbaben fit fouiller la forêt de Dreux et envoya des dragons jusqu'à Marcilly-sur-Eure, mais ces cavaliers furent repoussés par les gardes nationaux, qui leur tuèrent un cheval et firent un prisonnier.
De son côté, le général de Redern, qui faisait face à notre corps de l'Eure, lança des patrouilles dans la direction de Boissy-Mauvoisin et de Gilles, pour maintenir ses communications avec le général de Rheinbaben; à Gilles, les hussards du 11e régiment essuyèrent la fusillade de francs-tireurs embusqués sur la lisière d'un bois, et se retirèrent sur Mondreville, emmenant un officier et un sousofficier blessés dans cette rencontre.
Dans la journée du 19, le général de Rheinbaben continua la poursuite sur la vallée de l'Avre, et poussa de nombreuses reconnaissances sur la ligne de l'Eure. coche verte

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boite verte Rencontres de Saint-Ouen-de-Marchefroy, de Marcilly-sur-Eure et de Verneuil

La brigade de Redern, de son côté, ne cessait d'observer nos avant-postes dans cette direction, et les mobiles de l'Ardèche et de l'Eure, les francs-tireurs et les gardes nationaux tiraillèrent presque toute la journée à Boissy-Mauvoisin, à Gilles, à Garennes et à Saint-Ouen-de-Marchefroy, où les hussards du 17e régiment de Brunswick perdirent deux hommes, dont un sous-officier.
A Marcilly-sur-Eure, l'engagement de la veille recommença entre les gardes nationaux du pays et des environs, appuyés par les francs-tireurs de la Gironde et du Puy-de-Dôme, et la brigade de Barby qui descendait le val de l'Eure.
Mieux renseignés cette fois, les Prussiens, débouchant par Louye, Saint-Georges et les Alains, attaquèrent sur plusieurs points.
Un instant cernés, les nôtres réussirent à s'échapper sans trop de pertes.
Marcilly-sur-Eure fut alors occupé et pillé par les Prussiens, qui se dirigèrent ensuite sur Croth.
Mais ils rencontrèrent à mi-chemin deux compagnies de mobiles de l'Ardèche, qui, accourues au bruit du combat, les arrêtèrent court dans la plaine de Roseux et les forcèrent à regagner Dreux vers quatre heures du soir.
Cette rencontre nous coûta trois hommes tués et quelques blessés ou disparus.
Du côté de l'ennemi, un dragon du 19e régiment oldenbourgeois et plusieurs landwehriens du 1e régiment de la garde furent plus ou moins grièvement blessés.
Sur la route de Verneuil, quelques coups de feu furent encore échangés entre notre arrière-garde et les patrouilles du général de Bredow; là un sous-officier et quelques dragons du 13e régiment de Schleswig-Holstein furent tués ou blessés en cherchant à ramasser nos traînards. coche verte

La marche des Allemands de Chartres sur Dreux avait causé en Normandie, et surtout sur la rive gauche de la Seine, une alerte des plus vives; on se figurait que le grand-duc de Mecklembourg, agissant de concert avec le général de Manteuffel, dont nous suivrons la marche dans le prochain chapitre, avait Rouen pour objectif; aussi, lorsque la présence de l'ennemi fut signalée à Nonancourt et à Marcilly, l'émotion redoubla dans le département de l'Eure.

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boite verte Reconnaissance des Prussiens sur Évreux et évacuation de cette ville (19 novembre)

Évreux , dont la route se trouvait ainsi complétement libre, n'avait, pour toute garnison, qu'un peloton de chasseurs à cheval, servant d'escorte au général, quelques gendarmes et un dépôt de mobiles convalescents, lorsque le 19 novembre, vers quatre heures de l'après-midi, les premiers éclaireurs ennemis arrivèrent à l'entrée de la ville.
C'était une forte reconnaissance de la brigade de Bredow , formée de détachements du 7e cuirassiers , du 13e dragons et du Ie régiment de la landwehr de la garde avec une section d'artillerie.
Après avoir pris position sur les hauteurs de la Madeleine , les Prussiens détachèrent des patrouilles qui avaient pour mission de détruire la voie ferrée; mais elles furent reçues à coups de fusil et dispersées par les employés de la gare, aidés de quelques gardes nationaux.

A Evreux , comme sur la plupart de nos lignes, le personnel du chemin de fer comptait beaucoup d'anciens militaires qui redevenaient soldats en présence de l'ennemi.
L'attitude énergique de ces employés est d'autant plus méritoire, que les Prussiens, surtout ceux de la brigade de Bredow , comme on l'a vu tout à l'heure à Nonancourt , ne manquaient pas d'exercer sur eux, même sans provocation, les plus cruels traitements.
Ne s'attendant coche verte sans doute pas à cette résistance, et ayant, d'ailleurs, atteint le but de sa reconnaissance, l'ennemi reprit aussitôt la route de Dreux et couvrit sa retraite en lançant sur Evreux une vingtaine d'obus.
Cette affaire coûta aux dragons et aux cuirassiers, ainsi qu'aux artilleurs et aux landwehriens, sept ou huit hommes tués ou blessés, dont trois sous-officiers.

Le général de Kersalaun , qui commandait la subdivision de l'Eure, se voyait réduit à ses propres forces, et découvert sur sa droite par la retraite du général de Malherbe jusque sur l'Iton; convaincu, d'ailleurs, qu'Evreux allait être attaqué le lendemain par les forces considérables dont la présence lui avait été signalée à Dreux, et craignant que notre petit corps de la vallée de l'Eure ne lût pris à revers, il donna l'ordre au colonel Thomas de se replier sans retard sur Gaillon .
Le 20 novembre, nos troupes d'observation de la vallée de l'Eure arrivèrent dans cette dernière ville.
Le général de Kersalaun , qui les y avait précédées après avoir fait évacuer Evreux , dirigea immédiatement la garde mobile de l'Eure et quelques corps francs sur Conches , et ses autres bataillons sur Louviers par le chemin de fer.
De Louviers , il les porta sur Beaumont-le-Roger et Bernay , dans le but d'occuper la ligne de la Rille et de couvrir à Serquigny , où avaient été exécutés quelques travaux de défense, la seule voie ferrée qui reliât encore le Sud de là France avec le Nord.

Ce mouvement de retraite, qui découvrait d'un seul coup la presque totalité du département de l'Eure, souleva de vives critiques, et le général de Kersalaun fut presque aussitôt relevé de son commandement.
Il est juste, toutefois, de reconnaître qu'il n'avait fait que se coche verte conformer aux instructions ministérielles données au général Delarue; qu'il manquait de cavalerie pour s'éclairer; qu'il avait à surveiller une ligne fort étendue qu'il n'aurait pu empêcher le détachement de Bredow d'entrer à Evreux le 19, si l'ennemi avait voulu occuper cette ville.
Enfin la confusion était telle à cette époque dans le département de l'Eure, comme dans le reste de la Normandie, et les mutations si fréquentes, que le général de Kersalaun ne savait même pas, malgré des dépêches réitérées, quel était son supérieur immédiat.
Après son départ, le commandement de la subdivision de l'Eure fut réuni, mais seulement à titre provisoire, à celui du général Briand, qui venait d'être replacé à Rouen à la tête de la 2e division militaire.

En réalité, la démonstration faite sur Évreux par l'ennemi avait un caractère purement défensif: le général de Rheinbaben avait principalement pour but de détruire le chemin de fer, de le rendre impraticable pour le transport de nos troupes, et de couvrir ainsi le grand-duc de Mecklembourg pendant qu'il se rabattait vers le Sud.

SUITE ...